Il était une jarre au fond d'un fleuve.
Elle était belle.
Si le soleil l'avait éclairée, on aurait vu miroiter l'or
de ses flancs ciselés.
Mais elle était au fond du fleuve, droite et figée car pleine
de lourde terre mêlée de cailloux.
Elle était là, inutile, dans sa beauté cachée.
Ô jarre, incline toi vers le fleuve.
Incline toi vers Dieu, Ô mon âme !
Alors le courant effleurera ton col.
Patiemment il imbibera puis dissoudra, peu à peu, la terre
qui t'emplit.
Il creuse et rejette la terre et toi tu ne vois plus que
l'eau troublée,
tu ne vois plus que la boue jaillissante qui cache la beauté
de tes flancs
et tu désespères.
Patience, Ô mon âme: Il creuse, Il te creuse.
Petit à petit, sans que tu le saches Il agrandit l'espace
où Il pourra venir loger.
Mais toi tu ne vois que boue.
Voilà que, peu à peu, la terre partant, la jarre s'allège.
Parfois elle glisse, un temps, dans le courant, puis elle
retombe, heurtant les pierres.
Mais, à nouveau, elle repart, cahotante.
Reste tournée vers le courant de l'Esprit Saint, Ô mon âme,
et un jour, quand la terre aura été toute dissipée,
quand les cailloux seront sortis
- un jour de renversement -
alors la jarre se soulèvera doucement et elle partira,
suavement,
oublieuse et immergée,
vivre l'Aventure du courant de Dieu.
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